Messe de funérailles de Boniface Yenkoidiog

Lectures de la messe de funérailles de Boniface Yenkoidiog : Sagesse 4, 7-15 ; Psaume 26 ; Jn 6, 51-58
Homélie (P. Matthieu Delestre, c.o.)

 

 « Même s’il meurt avant l’âge, le juste trouvera le repos ». C’est ce que nous pouvons penser à propos de Boniface.

Cette Parole de Dieu, dans le livre de la Sagesse, vient au secours de l’inquiétude et du trouble de nos âmes, alors qu’un fils, un frère, un ami, un compagnon de route nous est retiré soudainement et beaucoup, beaucoup trop tôt.

La Parole de Dieu, toute entière, Boniface l’avait reçue comme vraie parole pour sa vie et son service en Église. C’est ainsi qu’il avait été institué lecteur pour le diocèse de Lomé. Et ce ministère, il tenait désormais à le vivre pour le diocèse de Dijon, ce qui était effectif dans les premiers jours de ce mois.

La Parole de Dieu, pour celui qui la médite et l’applique, procure la Sagesse. Et la Sagesse, si un jeune la reçoit et l’applique concrètement, lui tient lieu de cheveux blancs. Boniface, dont le prénom de baptême veut dire « Celui qui fait le bien », s’appliquait à faire le bien. Étudier la philosophie avait motivé son arrivée à Dijon, mais il a donné ici bien mieux qu’une preuve académique de son amour de la sagesse. Dans le service concret des personnes âgées qu’il aidait à domicile, il a manifesté pleinement qu’il avait le respect des anciens, à ce très haut degré qu’on a en Afrique. Cela compte particulièrement parmi les dons qu’il nous a faits depuis deux ans ici, en France, à Dijon. Cela, pourtant, a pratiquement passé inaperçu.

Tout comme l’essentiel de son âme a passé inaperçu. Il faut entrer dans le point de vue de Dieu pour connaître une âme humaine. Cela est vrai pour tout homme. Pour Boniface, qui évitait de parler et préférait rester en arrière de la scène du monde, c’est encore plus vrai. Notre frère, maintenant plus encore, est un mystère. Mais il se trouve que Dieu semble Lui-même préférer la discrétion. Dieu, pour se faire connaître, passe par des mystères. Alors les lumières qu’il nous donne sur Boniface ne nous expliquent pas grand-chose de lui. Mais nous savons que ces lumières viennent de la grande lumière de l’Amour que Dieu a pour notre ami. Nous ne pouvons comprendre quelqu’un qu’en suivant le chemin de l’amour. Le long, le lent chemin de l’amour.

Alors, pourquoi si peu de temps entre Boniface et nous ?

Peut-être pour nous demander ce que nous faisons de notre temps, si nous ne l’employons pas à aimer ?

Laissons le point d’interrogation à la fin des réponses que nous voudrions essayer de formuler. L’amour vrai n’efface pas les points d’interrogation.

Le livre de la Sagesse, malgré son nom impressionnant, malgré la pure et vraie inspiration qui donne vie à ses mots, ne nous donnera pas toute la réponse. Il dit qu’un être qui meurt jeune est préservé du mal qui aurait pu l’atteindre et le dévoyer s’il avait vécu plus longtemps ; il dit aussi que Dieu a voulu lui donner tôt sa couronne parce qu’il avait, en fait, atteint le but. Mais il ne dit pas qu’on ne peut rien objecter de sage à cela ; et surtout, il ne dit pas (pas encore, car c’est un texte de l’ancien Testament) le Nom de Jésus-Christ, le seul à pouvoir vraiment répondre et correspondre à cette prophétie.

Boniface n’était pas Jésus. Mais il voulait être son serviteur et son ami. Il voulait, en particulier, vivre son baptême en tant que serviteur de la Parole et de l’Eucharistie. Et il avait aussi été institué, pour cela, acolyte, en vue de devenir prêtre. Il y a neuf jours, à cet autel, il purifiait le calice après la communion. Il avait, ce jour-là, pour la première fois depuis son départ du Togo, revêtu sa soutane.

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. »

Frères et sœurs, avec Boniface et pour lui, choisissons cette demeure-là. Choisissons de toujours recevoir, servir et honorer le Corps vivant de Jésus, dans la communion de l’Église universelle. Ce Corps vivant, comme une nourriture à un repas de noces, se partage entre nous et nous réunit tous. Il nous relie non seulement par-delà toutes nos frontières, distances et séparations terrestres, mais aussi et surtout par-delà l’ultime frontière, qui nous sépare encore de ceux qui sont passés avant nous vers le bonheur du ciel. »

Photos : I Fulon 

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