Un dimanche de Pâques « enchanté » par la Maîtrise de Dijon

En ce dimanche de Pâques où nous fêtons la résurrection du Christ, nous vous proposons des chants de la Maîtrise de Dijon enregistrés l’an dernier pendant la Messe du dimanche de Pâques en la cathédrale de Dijon.

Dans le même temps, le père Didier Gonneaud, curé de la cathédrale, propose une réflexion sur cette fête de Pâques :

C’est une vraie joie d’entendre, pour ce matin de Pâques, la messe « Amor a longe » de Joseph Samson, alternée entre la Maîtrise de la Cathédrale et le grand-orgue. Datant de 1938, elle décline une vieille mélodie médiévale dont le thème est déjà un programme : « L’amour vient de loin ». En ce matin de Pâques, l’amour vient vraiment de très loin, il revient du tombeau où la mort voulait l’engloutir, il revient des ténèbres qui voulaient éteindre sa lumière. Avec cette messe, c’est l’ambiance si particulière de notre cathédrale qui nous est donnée pour nous soutenir en ce temps de confinement.

L’introït de Pâques met, sur les lèvres du Christ ressuscité, les paroles du Psaume 138 : remarquable exemple de la manière dont la liturgie latine relit tout le psautier à partir du Christ. De façon intime, presque confidentielle, une mélodie pleine de retenue fait entrer dans le dialogue entre le Christ et son Père : « Je suis ressuscité, et je suis toujours avec toi ».

La tonalité de la mélodie est surprenante (c’est le quatrième mode grégorien, le plus déroutant pour nos oreilles contemporaines, un mode contemplatif, intérieur), elle évoque même certains passages de la Messe des défunts. Nous nous attendions à une joie éclatante, éblouissante, et nous sommes invités à tendre l’oreille : avant d’être une victoire triomphale, la Résurrection est d’abord l’émerveillement du Christ devant la vie nouvelle reçue de son Père.

Ne soyons donc pas trop tristes de manquer cette année toute la beauté de nos liturgies pascales : ce matin, l’essentiel de Pâques nous rejoint à travers la pudeur de Jésus. La modestie musicale garde la trace de la mort atroce sur la croix : Pâques n’est pas une sorte de « happy end », de « fin heureuse » qui gommerait artificiellement l’horreur de la Passion.

Nous ne sommes pas invités à faire comme si le monde ne continuait pas à souffrir, comme si nous n’éprouvions pas à certains moments la morsure de l’absence de Dieu. Ce qui provoque justement l’action de grâce de Jésus ressuscité, c’est que la mort elle-même n’a pas pu le séparer de Dieu : « Je suis toujours avec toi ». La mort a tout fait pour éloigner Dieu de l’humanité du Fils, mais le Père n’a jamais cessé de poser sa main bienveillante: « Tu as posé ta main sur moi ».

Après cet introït si poignant dans sa simplicité, un autre élément caractérise la liturgie pascale : la « Prose » qui précède l’Evangile et que nous entendons ici dans l’harmonisation de Joseph Samson. Cette prose, appelée « Victimae paschali laudes », est un dialogue entre l’assemblée et Marie Madeleine : on peut penser aux mystères du Moyen-Age qui mettaient en scène les récits bibliques en les paraphrasant. Au cœur de l’Evangile de Pâques, il y en effet Marie Madeleine, premier témoin du Christ ressuscité. Aussi la prose s’adresse à elle pour qu’elle renouvelle son témoignage : « Dis-nous, Marie Madeleine, qu’as-tu vu sur le chemin ? »

Avec cette mission qui revient en propre à Marie Madeleine, nous sommes devant un fait historique, tellement les premières générations chrétiennes ont été mises en porte-à-faux par ce témoignage confié à une femme. Si cet élément difficile a été retenu malgré tout, c’est bien parce qu’il fait partie essentielle de l’événement pascal : faire de Marie Madeleine « l’apôtre des apôtres » donne toute son ampleur à cet événement. Celle qui était au pied de la croix, celle qui revient accomplir pour Jésus les gestes d’onction funèbre, c’est elle qui est constituée « témoin de la miséricorde divine », pour reprendre les termes de Grégoire le Grand plusieurs rappelés par le pape François.

En ce jour de Pâques, nous penserons à ceux qui n’ont pas pu, ces dernières semaines, accompagner leurs défunts comme ils l’auraient souhaité. En ce jour, Marie Madeleine devient en quelque sorte leur sainte patronne, elle qui venait au tombeau pour rendre à Jésus les derniers honneurs. Cette ténacité décidée, cette fidélité malgré la mort, elle est devenue, dans le petit matin blême du dimanche de Pâques, mission d’annoncer la Résurrection.

Retrouvez le texte intégral du père Gonneaud sur ce lien

Retrouvez également sur les liens suivants les chants interprétés pour les vêpres de Pâques ainsi que pour le Salut du Saint Sacrement.

Sur ce lien, le texte du père Didier Gonneaud pour ces deux derniers temps forts de Pâques.

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