SEULLE ÉTOILE . L’élan d’une vocation

Jeudi dernier (1er juin) s’est ouverte « SEULLE ÉTOILE. L’élan d’une vocation », une exposition en forme d’hommage à la Congrégation des sœurs hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Beaune. L’auteur-photographe Guillaume Nédellec a capté avec une grande justesse et beaucoup de sensibilité, la vie de ces femmes d’exception. La Congrégation ne compte plus que quatre Sœurs; leur présence discrète, et pourtant si lumineuse, conférait à cet instant une saveur particulière au cœur même de la salle Saint-Nicolas des Hospices de Beaune. Un moment de grâce que nous vous invitons à partager avec nous.

En dédiant leur vie à celle des autres, ces femmes extraordinaires ont fait briller la lumière de la vie dans le cœur de Beaune, cette même lumière que j’ai cherché à restituer aujourd’hui. 

Guillaume Nédellec

La directrice par intérim des Hospices de Beaune et Alain Suguenot, maire de Beaune et conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, entourent sœur Louise Duchini.

Des tonnerres d’applaudissements ont salué l’œuvre de la Congrégation des Sœurs Hospitalières de Sainte-Marthe de Beaune, représentées par leur supérieure générale, sœur Louise Duchini, la dernière religieuse à avoir fait profession, en 1972, de servir ici les pauvres.

« Vous faites partie du patrimoine de Beaune, mes Sœurs ! » leur a lancé le maire de la ville. Alain Suguenot a tenu à souligner que les sœurs hospitalières avaient apporté le même soin aux détails et aux « personnages » eux-mêmes que les immenses artistes qui ont fait de ce monument une merveille connue du monde entier. Les Sœurs Hospitalières de Beaune ont maintenu la tradition de qualité, de perfection, de tout ce qui a été vécu ici.

 Seule dame de ses pensées, elle sera l’astre qui lui montre le chemin du salut

Guigone de Salins avait épousé, le 20 décembre 1423, Nicolas Rolin, conseiller du duc de Bourgogne Jean sans Peur, puis chancelier de Philippe le Bon. Elle avait incité son noble et riche époux à fonder à Beaune, un « Palais pour les pauvres malades », près de la collégiale Notre-Dame de Beaune et de l’hôtel des ducs de Bourgogne de Beaune, alors siège du Parlement de Bourgogne.

      Nicolas Rolin et Guigone de Salins, au revers du polyptyque du Jugement dernier, peint entre 1443 et 1452 par Rogier van der Weyden, pour l’Hôtel-Dieu de Beaune, sur commande de son fondateur le chancelier de l’État bourguignon Nicolas Rolin. 

Tenture de saint Antoine, troisième quart du XVe siècle

L’acte de fondation de l’Hôtel-Dieu est signé le 4 août 1443 

Moi, Nicolas Rolin, chevalier, citoyen d’Autun, seigneur d’Authume et chancelier de Bourgogne, en ce jour de dimanche, le 4 du mois d’août, en l’an du Seigneur 1443, dans l’intérêt de mon salut, désireux d’échanger contre des biens célestes, les biens temporels, je fonde, et dote irrévocablement en la ville de Beaune, un hôpital pour les pauvres malades, avec une chapelle, en l’honneur de Dieu et de sa glorieuse mère ».

Sœur Louise Duchini avec sœur Marie-Josette Le Clainche (qui sera centenaire en 2024) et sœur Madeleine Chamard

Lorsque le Chancelier Rolin avait conçu son projet d’Hôtel-Dieu pour Beaune, il l’avait aussitôt associé à la présence de religieuses capables d’assurer la gestion de l’établissement et les soins aux malades dans un esprit de charité, de pauvreté et d’obéissance. Le 1er janvier 1452, Nicolas Rolin avait accueilli six religieuses à l’Hôtel-Dieu. En 1459, il avait rédigé – avec Guigone – une règle de vie pour les sœurs hospitalières de Beaune, ainsi que le statut de l’Hôtel-Dieu. Il avait créé ainsi la communauté des « Sœurs Hospitalières de Beaune » qu’il avait placée sous la dépendance directe de Rome. La réputation de l’Hôtel-Dieu de Beaune avait fait naître de nombreuses sollicitations de la part des hôpitaux voisins et entraîné la création de nouvelles communautés dans tout le bassin de la Saône, puis à Besançon et dans tout le massif jurassien, et même jusqu’aux confins de la Lorraine. Besançon et Pontarlier allaient essaimer en Suisse. En 1633, un an après l’arrivée d’une sœur en provenance de Beaune, les administrateurs de Chalon écrivaient à l’Hôtel-Dieu :

Il y a bien du mérite à gagner envers Dieu pour vous, Messieurs, et de gloire pour la ville de Beaune, d’avoir produit et dressé des filles dont la charité et la sainteté est si vénérable que vous en remportez sur vos voisins tel avantages qu’ils vous en cèdent toute prééminences sur eux .

Le général Jean-René Bachelet a offert aux Hospices de Beaune l’ours confectionné pour lui par « une des bonnes sœurs à cornette (celles de la Grande Vadrouille !) », dans du drap des « surplus américains » en 1944, alors qu’il venait de perdre son père.

Charité et humanité n’ont jamais cessé de guider le travail des sœurs. Sœur Louise Duchini a insisté sur le fait que les sœurs hospitalières étaient avant tout les « Servantes des Pauvres », comme en atteste le port du tablier blanc, qui est resté leur seul uniforme … Les  Sœurs Hospitalières de Beaune ont d’ailleurs pour signature : s.d.p, « Servantes des Pauvres ». « Inlassablement, avec foi et cœur, elles ont accueilli, écouté, soigné, accompagné chacun, comme s’il était seul à réclamer leur attention ».

François Poher, ancien directeur des Hospices civils de Beaune, a été le témoin du maintien de la tradition hospitalière. Dans son beau texte lu par la directrice par intérim des Hospices , il a rappelé que, pour les malades du XVe siècle, « le regard, le sourire, la parole réconfortante, la chaleur d’une main, les attentions et les gestes des soignants, étaient chaque jour  la « seulle étoile » qui les faisait espérer face à la maladie. »

Durant près de six siècles, des femmes libres et indépendantes, les sœurs hospitalières de Beaune, ont rempli cette mission d’humanité et d’espérance. Elles étaient là, fruits d’un engagement libre et réfléchi au service des autres, d’un engagement exigeant et fidèle à leur foi. Cette exposition nous engage pour l’avenir. Au travers d’instantanés surgit l’éternité. Et ceci nous confirme une chose : ce ne sont pas les sœurs qui sont mises en valeur, ce n’est pas non plus l’artiste, quels que soient leurs mérites respectifs ; ce qui transparaît in fine, c’est une facette profondément humaine et émouvante de cette monumentale et remarquable institution que sont les Hospices de Beaune.

Tous ces témoignages ont été entendus « religieusement » par ceux qui étaient venus, nombreux, admirer la belle exposition proposée par Guillaume Nédellec. Tous ont vécu avec grande joie cette « fête de famille », dans la simplicité, mais avec un infini respect pour l’œuvre des Sœurs de l’Hôtel-Dieu . Monseigneur Antoine Hérouard, archevêque métropolitain de Dijon, a pu exprimer à son tour sa reconnaissance aux sœurs qui, ayant entendu l’appel du Seigneur, ont donné généreusement leur vie au service des pauvres, des malades.

A sa manière, l’association « Hommage aux sœurs hospitalières de Beaune » perpétue le souvenir de ces Dames qui ont servi les « Pôvres », en leur Palais de Beaune …Ce sont elles qui ont confectionné les costumes, sur le modèle d’origine de l’époque de Guigone de Salins ainsi que les voiles tirés à … 40 épingles ! Sur la photo, elles ont été rejointes par sœur Louise Duchini et par Guillaume Nédellec.

Merci à Marie-Aleth Trapet pour les textes et MDo Trapet pour les photographies.  

 
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